Tnp – salle Laurent Terzieff- avec Jean-Chritophe Angaut
Nous sortons d’une époque où le secret et la discrétion étaient considérés comme déplorables lorsqu’ils concernaient la sphère de l’action publique (secrets d’État, pouvoirs discrétionnaires), et comme souhaitables lorsqu’ils portaient sur la vie privée (avoir son jardin secret, pour vivre heureux vivons cachés…). À certains égards, cette approche s’est renversée. D’un côté, la pratique du secret par les individus est désormais mal vue : lorsque l’on a quelque chose à cacher, n’est-ce pas qu’on a aussi quelque chose à se reprocher ? Et d’un autre côté, la dénonciation des secrets d’État a moins bonne presse, et quiconque s’y adonne court le risque de se voir qualifié de complotiste. L’heure serait plutôt à l’exposition de soi et à la justification des secrets d’État.
L’objectif de cette série de cours est triple. 1) Ébaucher un diagnostic sur notre rapport à des notions comme le secret, la discrétion, voire la clandestinité aujourd’hui, et aux pratiques qu’elles recouvrent. 2) Interroger les facteurs qui ont conduit à modifier notre rapport à ces pratiques. 3) Recenser les outils dont la philosophie peut nous doter pour penser les significations, les dimensions et les enjeux, notamment politiques, du secret.
Cette troisième séance cherchera à revaloriser des penseurs qui n’ont pas fait l’éloge de la publicité, et qui ont même au contraire prôné, dans une certaine mesure, l’usage de pratiques discrètes, voire secrètes, et néanmoins émancipatrices. Un sort particulier sera réservé aux sociétés secrètes à vocation révolutionnaire qui ont fleuri en Europe à partir du XIXe siècle, et il s’agira d’interroger l’actualité et la possibilité de telles pratiques aujourd’hui, alors que l’identification est devenue un enjeu politique et répressif.